Le rôle des femmes dans les systèmes éducatifs en Afrique
Le 8 mars, nous célébrons la Journée internationale des femmes
Le 8 mars, le monde célébre la Journée internationale des femmes, une occasion d'inspirer le changement pour les filles et les femmes et de transformer cet élan en action. L’occasion de rappeler que, si l’on n’investit pas dans les femmes et les filles, il ne sera pas possible d'atteindre les objectifs mondiaux.
Ceci est le 2ème billet en 2018 d’une collaboration entre l’Association pour le développement de l’éducation en Afrique (ADEA) et le Partenariat mondial pour l’éducation (GPE), débutée en 2017.
Le 8 mars, la Journée internationale de la femme (JIF) est célébrée dans de nombreux pays du monde. En cette journée, les femmes sont reconnues pour leurs réussites sans que soient prises en considération de quelconques divisions, qu’elles soient d’ordre national, ethnique, linguistique, culturel, économique ou politique.
La JIF est également l’occasion de donner un coup d’accélérateur au Programme de développement durable 2030, ainsi qu’à l’Agenda 2063 pour l’Afrique, en traduisant cet élan dans l’action par la mise en œuvre effective des Objectifs de développement durable (ODD), en particulier les Objectifs numéro 5 (Parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles) et numéro 4 (Assurer l’accès de tous à une éducation de qualité sur un pied d’égalité et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie).
L’absence des femmes dans les systèmes éducatifs a renforcé l’inégalité entre les sexes
Dans le passé, le développement des systèmes éducatifs en Afrique a ignoré les femmes. Cela se constate clairement dans les disparités criantes qui marquent les taux d'accès, de rétention et d'achèvement des garçons et des filles. Pendant très longtemps, les filles ont représenté la plus grande partie de la population d’enfants exclus de l’éducation.
Les toutes dernières données de l’ISU révèlent que l’Afrique héberge plus de la moitié des enfants non scolarisés et en âge de fréquenter le primaire dans le monde. Dans la région, la moitié de ces enfants n’ont jamais été inscrits à l’école et sont susceptibles de ne jamais y aller, faute d’incitation supplémentaire. Les filles sont davantage susceptibles (56 %) de n’avoir jamais été inscrites à l’école que les garçons (42 %).
Ces statistiques criantes corroborent le fait que l’absence des femmes lors du développement des systèmes d’éducation et de formation en Afrique a eu des conséquences non négligeables sur les inégalités dans le secteur, et donc sur le développement socioéconomique du continent.
L’éducation des femmes est aujourd’hui le moyen le plus efficace de réduire les inégalités entre les hommes et les femmes et de garantir l'entière participation des femmes dans le processus de développement socioéconomique.
Les politiques pour combler le fossé en matière d’égalité des sexes
On constate une importante évolution vers l’inclusion des femmes et des droits des femmes dans les décisions clés en matière d’éducation. Le Protocole de Maputo et d’autres cadres importants de l’Union africaine expriment la nécessité de combler le fossé entre les hommes et les femmes en matière d'éducation et dans d'autres secteurs, ainsi que de renforcer l’importance de l’inclusion des femmes dans les processus décisionnels. Ces documents ont instauré le rythme et l’espace adéquats pour que la voix des femmes soit entendue sur les questions de développement de l’Afrique.
Les États africains ont également élaboré des politiques qui reconnaissent le rôle des femmes dans les systèmes éducatifs. Ces politiques ont permis des actions de discrimination positive à tous les niveaux de l'éducation avec l’attribution aux femmes de davantage de postes à différents niveaux des institutions pédagogiques et la réintégration des mères adolescentes à l'école. Des dispositions ont également été prises en faveur d'environnements non discriminatoires, certains États instaurant des lois et des directives afin de prévenir et de limiter la violence scolaire liée au genre (VSLG).
Par ailleurs, plusieurs pays mettent en place des budgets prenant en compte l'égalité entre les sexes et réservant aux femmes des postes au sein de leur ministère de l'éducation et de leur parlement, comme c’est le cas au Rwanda et au Kenya. Les femmes sont également nommées à la tête d'institutions pédagogiques. Ces progrès sont considérables, mais il reste beaucoup à faire pour pallier les inégalités entre les sexes au sein des systèmes éducatifs en Afrique.
Les femmes sont nécessaires dans les processus de prise de décision et d'élaboration des politiques
Aujourd’hui, 263 millions d’enfants et de jeunes sont non scolarisés, dont 130 millions en Afrique, selon les nouvelles données recueillies par l’Institut de la Statistique de l’UNESCO (ISU) en 2016. Les questions telles que la pauvreté, la guerre et les stéréotypes culturels continuent de constituer des obstacles à l’accès des enfants à l’éducation.
Les filles handicapées sont tout particulièrement marginalisées. De récentes études en Afrique occidentale ont constaté que ces dernières étaient particulièrement isolées, stigmatisées, et qu'elles faisaient l’objet de discrimination, étant exclues de l’école et d’autres opportunités de participation à la vie communale ; elles sont également davantage exposées aux abus, notamment à la violence sexuelle.
Cela souligne la nécessité de la présence des femmes là où sont prises les décisions, qu’il s’agisse de la sphère sociale, économique ou politique du développement de l’Afrique.
Les femmes devraient non seulement avoir un espace où elles se sentent à l’aise pour faciliter leur action, mais le nombre de femmes occupant des postes de décision devrait également augmenter.
Les femmes devront se soutenir entre elles au sein de ces structures décisionnelles et de mise en œuvre des politiques décidées. Il est cependant crucial pour ces femmes de ne pas agir en isolation, car elles auront besoin d’un encadrement et d’un soutien continus.
L’appel du FAWE lancé au monde et au continent
La Stratégie continentale de l'éducation pour l'Afrique (CESA 16-25) est très claire en ce qui concerne ses aspirations en matière d’éducation sur le continent, et comment celles-ci s’inscrivent dans l’agenda du développement durable. Malheureusement, les questions des femmes ne sont pas bien articulées dans ce document.
Au Forum des éducatrices africaines (FAWE), nous pensons qu’il est nécessaire de soutenir les différents États qui mettront en œuvre la stratégie permettant d’opérationnaliser et d’intégrer les questions de genre dans leurs programmes et budgets pour toutes les interventions qu’ils feront dans le secteur de l’éducation. Les États respectifs devraient être prêts à adopter et à s’approprier la Stratégie sur l’égalité entre les sexes pour la CESA 16-25 développée par le FAWE et le CIEFFA/UA comme outil afin de traiter des questions de genre dans le secteur éducatif.
Mais les femmes ont également besoin de jouer un rôle critique dans l’encadrement des jeunes filles et des jeunes garçons dans les espaces décisionnels. Ayant occupé une position perçue comme inférieure par la société, pour participer au leadership en Afrique, y compris au sein des plus hauts organes du continent - avec la nomination par exemple de Dlamini Zuma comme Présidente de la Commission de l’Union africaine (CUA) - les femmes doivent créer des espaces afin que les jeunes puissent explorer leur potentiel.
Les femmes haut placées doivent faire pression pour des politiques qui créent un environnement propice à l’allocation de ressources au développement de la jeunesse (18 – 35 ans) et des jeunes du continent. Cela contribuera largement à garantir à pied d’égalité aux filles, aux garçons et aux jeunes des opportunités et des ressources pour mener à bien leurs aspirations.